J’avais été très surpris de découvrir la passion de Sartre pour la boxe. Il avait même pratiqué alors qu’il était étudiant. Pour moi, cela me paraissait aussi saugrenu que d’imaginer Marcel Proust faisant du karate (ce qui m’a donné l’idée d’un petit roman devant paraître l’année prochaine). Cela dit, j’ai découvert qu’il existait un certain nombre d’écrivains pratiquant les sports de combat. En premier lieu on pense à Hemingway et la boxe, mais je me souviens avoir lu que Lord Byron s’était également adonné au « noble art », et avait pris des leçons auprès du champion du monde de l’époque. En fait, il existe quelques écrivains connus pour leur goût de la pratique d’exercice virils : Maupassant, Pierre Loti, Gabriele d’Annunzio, Montherlant… J’aimerais écrire un jour à essai à ce sujet dans le genre « la plume et le poing ». C’est assez proche de ce précepte japonais du « bun bu ryô dô » : la double voie de la littérature et de l’art martial. Il faut cultiver les lettres en même temps que s’exercer au combat, afin de devenir un homme accompli. J’aime beaucoup cette idée. Mishima était aussi fasciné par cette éthique alliant « le fleuve du corps » et « le fleuve de l’écriture ». Il pratiquait lui-même les arts martiaux et on peut s’amuser de ce qu’il écrit à Kawabata : « C’est la troisième année que je fais du karate, et je viens enfin d’obtenir ma ceinture noire – ce qui veut dire, si j’additionne tous mes grades en arts martiaux, que je suis désormais neuvième dan -, mais quand on devient fort, on ne trouve plus vraiment d’adversaire à sa mesure, et je me sens frustré ». Sacré Yukio !
Enfin, pour ma part, moi qui suis un vrai rat de bibliothèque, assez curieusement j’ai toujours été passionné par les arts martiaux. J’ai commencé en faisant un peu de karate, de self-défense et d’aikido mais la révélation a été avec cet art martial rarissime en France : le taido. Révélation tardive puisque je ne l’ai découvert qu’à l’âge de dix-neuf, alors que j’étais à l’université. Etant étudiant en lettres modernes, j’avais beaucoup de temps pour m’entraîner et je me suis donc jeté pleinement dans la pratique, m’entraînant tous les jours. Quatre ans après, mon professeur, Marc Truong, me décernait ma ceinture noire. Après cela, j’ai enchaîné plusieurs compétitions : interclubs, coupe amicale en Hollande, à Hirosaki (au Japon), championnats d’Europe (Finlande), Championnats du monde (Suède)… Mon meilleur classement à été lors des championnats d’Europe 1995 (eh oui, ça commence à dater !) où j’ai fini troisième en combat par équipe. En fait, depuis plus d’une dizaine d’années, je me consacre à l’enseignement. J’ai d’abord commencé à l’université avec deux amis (Jérôme Guillou et Arnaud Simon) et depuis six ans au sein de mon propre dojo (lieu d’entraînement) que j’ai fondé avec ces amis et avec Sébastien Keith avec qui j’enseigne trois fois par semaine. Je suis actuellement deuxième dan. Je tiens particulièrement à ce grade puisqu’il m’a été remis par le fondateur en personne, Seiken Shukumine, lors de mon séjour au Japon en 2000, alors qu’il était encore vivant. Pour terminer ma carrière sportive j’envisage de participer aux prochains championnats du monde qui auront lieu cet été au Japon, à Hiroshima.